
Condamné pour malversations dans l’affaire de l’immeuble de Londres, l’ancien bras droit du pape François se retire de l’élection pontificale, tout en clamant son innocence.
Cité du Vatican – Le cardinal Angelo Becciu a annoncé son désistement volontaire du prochain conclave prévu le 7 mai, marquant une nouvelle étape dans une affaire qui continue de secouer le Saint-Siège. Bien qu’il affirme ne reconnaître aucune culpabilité, sa décision intervient sous la pression de ses pairs et de documents signés du pape François, lui interdisant de participer au vote du prochain successeur de Saint Pierre.
Une exclusion officieuse devenue officielle
Jusqu’à récemment, Becciu revendiquait son droit à participer au conclave, arguant que le pape n’avait jamais formellement révoqué ses prérogatives cardinalices.
« Le pape n’a jamais exprimé la volonté explicite de me priver de ma participation ni exigé ma démission par écrit », a-t-il déclaré devant ses confrères cardinaux.
Cependant, selon le quotidien El Tiempo, le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’État du Vatican, a présenté deux lettres officielles du pape — l’une datée de 2023 et l’autre du mois dernier — confirmant noir sur blanc l’exclusion de Becciu du collège électoral. Ces documents ont été divulgués lors des premières congrégations préparatoires.
Le scandale de Chelsea : une chute retentissante
La disgrâce de Becciu est liée à l’affaire explosive de l’acquisition d’un immeuble de luxe à Londres, situé sur Sloane Avenue, pour un montant de 200 millions de livres sterling. Cette transaction, réalisée durant son mandat à la Secrétairerie d’État, a donné lieu à des accusations de détournement de fonds, de fraude aggravée et d’abus de pouvoir.
En 2023, le tribunal du Vatican a condamné Becciu à cinq ans et demi de prison, lors d’un procès historique qui s’est étalé sur plus de deux ans, avec 86 audiences. En 2020 déjà, le pape François avait pris une mesure exceptionnelle en le démettant de ses fonctions de Préfet de la Congrégation pour les Causes des Saints et en lui retirant ses privilèges.
Une renonciation calculée
Selon La Repubblica, Becciu aurait confié à ses proches que sa décision de se retirer du conclave n’était « en aucun cas une reconnaissance de culpabilité », mais une manière d’éviter d’endommager davantage l’image de l’Église. Il continue de se déclarer victime d’un complot interne, derrière ce qu’il décrit comme une cabale contre sa personne.
Son retrait a permis d’éviter un vote embarrassant au sein du collège des cardinaux, qui, selon Libero Quotidiano, aurait pu être contraint de se prononcer à bulletin secret sur sa participation — un scénario sans précédent dans l’histoire récente du Vatican.
Une carrière diplomatique brillante entachée par la controverse
Né en 1948, Angelo Becciu a servi dans la diplomatie vaticane pendant près de 35 ans, en République centrafricaine, au Soudan, en Nouvelle-Zélande, en Grande-Bretagne, aux États-Unis, en France, à Cuba, en Angola et à São Tomé-et-Príncipe. En 2011, il devient Substitut aux Affaires générales, devenant de facto le numéro trois du Vatican, poste stratégique qu’il occupera jusqu’en 2018.
À cette époque, il est considéré comme papabile — un potentiel successeur du pape — et l’un des hommes de confiance de François. Son ascension fulgurante fait d’autant plus contraste avec sa chute brutale.
Becciu aujourd’hui : cardinal sans pouvoir
Bien que toujours titulaire du titre cardinalice, Becciu n’exerce plus aucune fonction au sein de la Curie romaine. Il est désormais cardinal non-électeur, et assiste uniquement aux congrégations générales. Sa présence continue néanmoins d’alimenter les conversations au sein du Collège des cardinaux à l’approche du conclave.
Alors que les cardinaux s’efforcent de désamorcer les tensions et clore les dossiers délicats avant l’élection, le cas Becciu rappelle que même au cœur du Vatican, transparence, responsabilité et vérité restent des vertus fragiles — et hautement politiques.
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