M. Compaoré, 71 ans, qui voyageait depuis Abidjan dans un avion mis à sa disposition par la présidence ivoirienne, a atterri à la base militaire de Ouagadougou, peu avant 14H00 (GMT et locales).
C’est la première fois que l’ex-président foule le sol de son pays depuis qu’il a été contraint de s’exiler en Côte d’Ivoire en octobre 2014, après de violentes émeutes populaires qui avaient éclaté contre sa volonté de rester au pouvoir après 27 ans de règne.
Il ne s’agit toutefois pas d’un retour définitif, mais d’un séjour de quelques jours à l’invitation du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, nouvel homme fort du Burkina, auteur d’un coup d’Etat en janvier qui a renversé le président Roch Marc Christian Kaboré.
Au même titre que les anciens présidents burkinabè encore en vie, M. Compaoré doit participer à une réunion pour « accélérer la réconciliation nationale » face aux attaques djihadistes qui ensanglantent le Burkina Faso depuis 2015 et se sont multipliées ces derniers mois.
A l’aéroport de Ouagadougou, où des dizaines de sympathisants espéraient apercevoir l’ex-président, des banderoles et des portraits, étaient brandis pour saluer ce retour.
Union sacrée
Au pouvoir depuis son putsch du 24 janvier, le lieutenant-colonel Damiba tente de créer une « union sacrée » autour de lui pour l’aider dans la lutte contre les groupes djihadistes qui ensanglantent le Burkina Faso depuis 2015 et dont les attaques de plus en plus meurtrières se multiplient ces dernières semaines.
La rencontre de ce vendredi entre les chefs d’Etat est notamment organisée pour « mutualiser les énergies et les synergies (…) pour lutter efficacement contre la tragédie qui nous frappe », selon le porte-parole du gouvernement, Lionel Bilgo.
« Forfaiture »
Outre Blaise Compaoré, président de 1987 à 2014, sont également invités Jean-Baptiste Ouedraogo (1982-1983), Isaac Zida qui avait brièvement pris le pouvoir en 2014 et actuellement en exil au Canada, Michel Kafando (2014-2015) et Roch Marc Christian Kaboré, élu en 2015 et renversé en janvier.
Mais le retour de Blaise Compaoré ne fait pas l’unanimité au Burkina Faso.
Le 6 avril, il a été condamné par contumace au Burkina à la prison à perpétuité pour son rôle dans l’assassinat de son prédécesseur Thomas Sankara, lors d’un coup d’Etat qui l’avait porté au pouvoir en 1987.
« Ce serait une forfaiture si Blaise Compaoré venait au Burkina Faso et en repartait allègrement. Cela voudrait dire que dans notre pays, il n’y a plus ni justice ni loi », a estimé Bénéwende Stanislas Sankara, un des avocats de la famille Sankara.
« Le pouvoir issu d’un coup d’Etat militaire, dont la légitimité apparait fragile (…) affiche ainsi clairement son mépris pour la justice de son pays », renchérit le réseau international justice pour Sankara, justice pour l’Afrique qui demande que Blaise Compaoré soit « arrêté ».
Le chercheur Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, directeur du groupe de réflexion Free Afrik, affirme de son côté que « la réconciliation ne saurait être une prime à l’impunité. En quoi la consécration de l’impunité sert-elle la lutte contre le terrorisme? ».
Mercredi, la présidence avait indiqué dans un communiqué que la rencontre de vendredi « importante pour la vie de la Nation n’entrave pas les poursuites judiciaires engagées contre certains » anciens chefs d’Etat.
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