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Une rencontre diplomatique à Riyad ouvre une nouvelle phase de dialogue, malgré des obstacles majeurs et des positions divergentes
Le conflit entre la Russie et l’Ukraine, qui dure depuis 2014 et s’est intensifié en 2022 avec l’intervention militaire russe, continue de susciter une vive inquiétude sur la scène internationale. Dans ce contexte tendu, une rencontre inédite a eu lieu à Riyad, en Arabie saoudite, où le Secrétaire d’État américain Marco Rubio a rencontré le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Cet échange s’inscrit dans le prolongement de l’entretien téléphonique entre le président Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine le 12 février, marquant ainsi un rare moment de dialogue direct entre Moscou et Washington depuis le début de la guerre.
Un premier pas vers la paix selon le Département d’État
Le Département d’État américain a précisé qu’« un seul appel téléphonique suivi d’une unique rencontre ne suffisent pas à instaurer la paix. Nous devons agir, et aujourd’hui, nous avons franchi une étape importante. » Les officiels américains, conscients de la complexité de la situation sur le terrain, insistent sur la nécessité de mesures concrètes et de consultations régulières pour parvenir à une solution durable.
Le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio, s’est dit « prudemment optimiste » quant à la suite des pourparlers, tout en rappelant que les négociations ne faisaient que commencer et que de nombreux points restaient à clarifier, notamment la question de la souveraineté de l’Ukraine et celle des territoires annexés ou sous occupation.
Accord pour un processus de règlement du conflit et levée d’obstacles diplomatiques
De son côté, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a annoncé que la Russie et les États-Unis avaient convenu d’établir un processus visant à régler le conflit en Ukraine et à lever les barrières entravant le travail de leurs représentations diplomatiques respectives. Cette déclaration survient alors que les relations entre Washington et Moscou sont particulièrement tendues, notamment depuis les sanctions imposées par les pays occidentaux à l’encontre de la Russie.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a quant à lui indiqué que Vladimir Poutine était prêt à négocier avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. « Poutine lui-même a déclaré à maintes reprises qu’il serait prêt à négocier avec Zelensky, si nécessaire. En même temps, la formalisation juridique des accords exige une discussion sérieuse, compte tenu du fait que la légitimité de Zelensky est remise en question par certaines entités russes. »
La position de Moscou sur l’adhésion de l’Ukraine à l’UE et l’OTAN
Par ailleurs, le Kremlin a fait savoir, par la voix de son porte-parole, qu’il ne s’opposait pas à l’éventuelle adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, qualifiant cette décision de « droit souverain de Kyiv, tant qu’il ne s’agit pas d’une alliance militaire ». Néanmoins, Peskov a souligné que « les projets de l’UE de créer sa propre armée doivent être surveillés de près, et des conclusions devront être tirées. »
Sergueï Lavrov a également rappelé la ligne rouge de Moscou en ce qui concerne l’expansion de l’OTAN à l’Ukraine, la considérant comme une menace directe pour la souveraineté russe. Les officiels russes ont réitéré que la simple non-adhésion de l’Ukraine à l’OTAN ne suffisait plus à leurs yeux, et qu’un statut de neutralité ukrainien constituerait l’option la plus acceptable pour la Russie.
Contenu des pourparlers et réactions du Département d’État
Selon le Département d’État, quatre points majeurs ont été abordés et approuvés à Riyad :
- Établir un mécanisme de consultation afin de régler les irritants dans la relation bilatérale et œuvrer à la normalisation du fonctionnement des missions diplomatiques américaines et russes.
- Nommer des équipes de haut niveau chargées de travailler à la cessation rapide du conflit en Ukraine, de manière durable et acceptable pour toutes les parties.
- Poser les bases d’une coopération future sur des sujets d’intérêt géopolitique commun, en tenant compte des opportunités économiques et d’investissement qui émergeront d’une fin réussie du conflit en Ukraine.
- Maintenir un engagement mutuel pour faire progresser le processus de négociation dans des délais raisonnables et de manière productive.
Le Département d’État américain a insisté : « Un seul appel, suivi d’une rencontre, ne suffit pas pour instaurer la paix. Il faut aller plus loin, et aujourd’hui, nous avons fait un pas important dans cette direction. »
Mike Waltz, conseiller à la Sécurité nationale, a déclaré que les parties devaient envisager un arrêt définitif de la guerre en Ukraine, y compris via des discussions sur les questions territoriales et les garanties de sécurité. Il a également précisé que le président Trump était « déterminé à avancer très rapidement » sur le dossier.
Les réponses russes après les rencontres
La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a rappelé que la Russie exige que l’OTAN renonce à sa promesse de 2008 d’accueillir l’Ukraine au sein de l’Alliance et que Kyiv accepte un statut de neutralité. Elle a précisé que l’idée d’interdire simplement à l’Ukraine de rejoindre l’OTAN n’était plus suffisante pour Moscou.
Les délégations russe et américaine ont commencé à se « prêter une oreille attentive », mais il est prématuré de parler de compromis, a indiqué Kirill Dmitriev, chef du fonds souverain russe, à l’issue des discussions. « Il est trop tôt pour parler de concessions. On peut néanmoins dire que les deux parties ont entamé un dialogue et se sont écoutées. »
Lavrov a également averti que l’envoi de troupes de l’OTAN – ou de tout autre pays de l’Alliance – en Ukraine, même sous couvert d’un mandat de l’UE ou d’autres bannières, serait jugé inacceptable par Moscou. « Nous avons expliqué à nos collègues ce que le président Poutine a déjà souligné à maintes reprises : l’expansion de l’OTAN vers l’Ukraine représente une menace directe pour les intérêts et la souveraineté de la Fédération de Russie. Et, sous une bannière européenne ou nationale, cela ne change rien pour nous. »
Perspectives économiques et soutien de Riyad
Dans un contexte de sanctions internationales et de fluctuations sur les marchés de l’énergie, les responsables russes et américains ont profité de la rencontre pour aborder également la question de la coopération économique à long terme. Kirill Dmitriev a affirmé que les discussions ont porté sur la stabilité des prix de l’énergie et l’investissement, dans l’éventualité où un accord de paix mettrait fin au conflit.
Le Département d’État américain et le ministère russe des Affaires étrangères ont tous deux exprimé leur gratitude envers le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane pour avoir accueilli ces pourparlers dans la capitale saoudienne. Riyad, qui entretient des relations à la fois avec Washington et Moscou, s’est ainsi positionné comme un partenaire potentiel pour faciliter les futurs échanges diplomatiques.
Pour plus de détails sur les positions officielles des gouvernements impliqués, consultez :
- Site officiel de la Maison Blanche
- Site officiel du Département d’État américain
- Communiqués du ministère russe des Affaires étrangères
Malgré l’optimisme mesuré suscité par cette rencontre inédite, beaucoup d’observateurs estiment que le chemin vers une résolution pacifique du conflit demeure long et parsemé d’embûches. Néanmoins, cette étape marque la reprise d’un dialogue direct entre deux puissances majeures, après des mois de tensions et d’escalade sur le front ukrainien.
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