“Chaque camp se renvoie la responsabilité de la reprise des affrontements après une trêve qui ne disait pas son nom”, explique un diplomate occidental à Kinshasa, qui avoue “être incapable de se prononcer sur l’identité du clan qui a déclenché cette nouvelle offensive”.
Certains messages émanant des troupes congolaises accusent une fois encore le Rwanda d’être à la base de cette nouvelle flambée de violence qui aurait fait, selon un de leur communiqué, “au moins quatre tués et 40 blessés”.
D’autres sources militaires pointaient aussi la complicité de l’autre voisin, l’Ouganda, qui aurait lancé deux bataillons pour soutenir les rebelles du M23. Certains des chefs de ce mouvement rebelle avaient trouvé refuge dans ce pays après la défaite de 2013.
Une version “non démentie par les responsables de Kampala”, nous explique une source de l’armée congolaise. “Nous n’avons pas à réagir à des rumeurs. Nous n’avons aucun intérêt à nous immiscer dans ce conflit”, nous explique une source ougandaise. “On a entendu que deux bataillons ougandais seraient impliqués dans ces combats, c’est de l’invention pure. D’ailleurs, nous n’avons reçu aucune notification officielle de la RDC. Ce sont des rumeurs qui circulent sur les réseaux sociaux qu’entretiennent peut-être certains militaires congolais pour justifier le fait qu’ils sont en difficulté face aux rebelles.”
Prise de Ntamugenga
Des rebelles qui ont pris dans la nuit de samedi à dimanche le contrôle de Ntamugenga, qui leur permet de se rapprocher de la Route nationale 2 qui dessert la capitale provinciale de Goma.
“Le front bouge peu”, explique une source militaire congolaise. “Si les rebelles ont gagné du terrain au sud et contrôlent désormais Ntamugenga, ils ont été repoussés sur les fronts de l’ouest et du nord.”
“C’est très compliqué de lire précisément ce qui se passe. Les communications sont multiples, les canaux officiels pas toujours crédibles, ce qui laisse une place de choix aux rumeurs et autres fake news qui se répandent sur les réseaux sociaux”, reprend le diplomate occidental à Kinshasa.
L’avancée des rebelles vers la Nationale 2 inquiète néanmoins. Personne n’a oublié qu’en 2013, ce même mouvement avait occupé brièvement Goma.
Quelle sortie de conflit ?
Aujourd’hui, beaucoup pensent que l’avancée des rebelles est surtout un message pour forcer le pouvoir de Kinshasa au dialogue. “Mais la rhétorique du pouvoir congolais interdit tout dialogue avec le M23. Pour Kinshasa, ce sont des terroristes et personne ne peut dès lors imaginer se mettre à table avec eux. Il ne reste donc que la solution militaire mais les FARDC ne paraissent pas en mesure, du moins pour le moment, de pouvoir vaincre ces rebelles”, constate une source proche du pouvoir ougandais qui pointe les nouvelles nominations orchestrées à la tête de l’armée par le président Tshisekedi. “Des nominations qui ont peut-être remis en cause certaines rentes, affaibli certaines mafias dans cette province. Ce qui pourrait peut-être expliquer la reprise des combats.”
Une piste pour tenter d’expliquer la nouvelle flambée de violence mais qui n’apporte aucun début de solution sur le terrain.
Félix Tshisekedi avait annoncé, lors d’une interview en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, en septembre dernier, que les troupes kényanes, annoncées dans le cadre du déploiement des forces régionales pour mettre fin à ce conflit et à tous les conflits dans l’Est, allaient entrer rapidement en action en pénétrant en RDC par le poste frontière de Bunagana. Un scénario qui se fait toujours attendre. “On ne peut pas espérer en finir ainsi avec ce conflit. On ne peut pas externaliser la sécurité de notre pays. La solution passe par une victoire de l’armée congolaise contre le M23 et les autres rébellions. Pour y parvenir, il faut investir sérieusement dans nos militaires, dans leurs armements et en finir avec les détournements des moyens qui sont annoncés pour ces hommes qui se battent sur le terrain”, conclut un ex-militaire congolais, en colère contre “les éternelles promesses du pouvoir”.
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