Iowa
Premier de la liste des États qui se prononcent sur l’investiture présidentielle, l’Iowa, État du Midwest plutôt conservateur, rural et blanc reçoit, une fois encore, toute l’attention du monde politique. Si l’on croit les sondages, Donald Trump y finirait bon premier, loin devant l’ex-gouverneure et ex-ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, et l’actuel gouverneur de la Floride, Ron DeSantis.
Ces deux derniers se battent âprement pour la deuxième place afin d’insuffler de l’espoir dans leur campagne contre l’ex-président républicain. La semaine dernière aura été, en tout cas, celle de tous les défis, particulièrement à cause des intempéries comme le froid polaire et le blizzard qui ont paralysé bien des services, mais qui ont surtout forcé l’annulation ou la réorganisation d’événements de campagne à plus petite échelle pour l’ensemble des candidats. Vendredi matin dès 7 h, par exemple, à Ankeny au nord de Des Moines, la capitale de l’Iowa, la neige a probablement tempéré la volonté des partisans de Ron DeSantis d’assister à son rassemblement dans un grand local commercial de la municipalité.
Une petite centaine de personnes l’attendaient. Ouvrir en mode plein écran Ron DeSantis joue son va-tout dans les caucus de l’Iowa. Après le traditionnel serment d’allégeance, les partisans ont écouté la populaire gouverneure de l’État, Kim Reynolds, qui a donné son soutien très convoité au gouverneur DeSantis. S’en est suivi un discours un peu mécanique du candidat républicain qui déclame parfois – selon les perceptions – sans grand enthousiasme, ses lignes de campagne.
Trump fait campagne sur ses propres problèmes, Nikki Haley sur les enjeux de ses donateurs, mais moi je fais campagne sur vos enjeux, ceux de votre famille, je me présente uniquement pour redresser ce pays. Quitte ou double pour DeSantis Dans la salle, il y a des convertis comme Laura Murphy. Nous avons besoin d’un président qui peut faire deux mandats pour qu’il puisse réaliser des choses durables.
Sous-entendu, à l’opposé de Donald Trump qui, s’il gagne, ne peut plus faire deux mandats consécutifs. Son mari Trent, qui a voté en 2016 et en 2020 pour Trump, choisit cette fois-ci le gouverneur de la Floride comme candidat, comme elle. Dans le monde TikTok et des réseaux sociaux, c’est Trump le meilleur vendeur, dit-il, mais dans le monde réel dans lequel je vis, celui des affaires et de la famille, je préfère un homme de terrain qui a fait tout ce qu’il a promis, et c’est DeSantis.
Burt Loveland, un nouveau partisan du gouverneur floridien, ne supporte plus non plus la personnalité de Trump. Le personnage semble avoir des défauts qui ne sont pas bons pour le pays, et puis il a aussi beaucoup de démêlés avec la justice. Ouvrir en mode plein écran S’il ne parvient pas à finir bon deuxième en Iowa, les espoirs de Ron DeSantis risquent de s’amenuiser dans cette course à l’investiture républicaine.
Des soutiens comme celui-là, Ron DeSantis en a bien besoin, car il est en perte de vitesse depuis des mois dans les sondages, loin derrière Trump. Dennis Goldford, professeur de sciences politiques à l’Université Drake de des Moines, estime que le gouverneur de la Floride joue son va-tout en Iowa. Le gouverneur DeSantis a parié sur l’Iowa parce qu’il n’a actuellement pas vraiment de soutien dans le New Hampshire [la prochaine étape dans les processus de sélection des candidats à l’investiture].
Il a donc tout misé sur l’Iowa et s’il n’arrive pas en deuxième position devant Nikki Haley, il est difficile de voir comment il pourrait aller plus loin , explique-t-il. Une bataille pour la deuxième place Il faut dire que Nikki Haley a le vent en poupe depuis quelques semaines. Quelques bonnes impressions lors des débats et de nouveaux bailleurs de fonds comme les frères Koch – conservateurs richissimes – et la course à la Maison-Blanche de l’ex-gouverneure de la Caroline du Sud a repris du poil de la bête.
Parmi les 300 personnes venues l’écouter à la même adresse que l’événement de DeSantis, quelques heures plus tôt, il y avait Dan et Corey Kelly. Lui est un républicain convaincu, alors qu’elle a bifurqué vers le Parti démocrate il y a 20 ans, mais elle songe à réintégrer les rangs conservateurs et elle apprécie la voie modérée de Nikki Haley.
Ouvrir en mode plein écran Au cours des dernières semaines, Nikki Haley a attiré de plus en plus de nouveaux partisans en Iowa. Je suis d’accord avec elle et le fait que le monde est en feu en ce moment et que Nikki Haley a la meilleure expérience en matière de politique étrangère et c’est ce dont nous avons besoin en ces temps de crises internationales , soutient Corey Kelly.
Son conjoint souhaite aussi ardemment que Nikki Haley remporte l’investiture républicaine à la place de Trump, pour qui il a cependant voté en 2016. Je n’ai jamais voté démocrate de ma vie, mais si Trump est le candidat investi par le parti, je voterai pour Biden, car je pense que Trump est devenu trop dangereux pour la république , affirme-t-il. Nikki Haley exploite beaucoup ce sentiment anti-Trump. Elle répète à qui veut l’entendre que l’ex-président sème le chaos partout où il passe .
Sa carte maîtresse pour le caucus de l’Iowa, ce sera la mobilisation de ces républicains frustrés par Trump, mais aussi de certains démocrates qui sont séduits par la conservatrice. C’est le cas de Calder Parrott, un jeune technicien qui habite à Council Bluffs dans l’Iowa rural. Lui qui a participé pour la première fois aux caucus il y quatre ans pour le Parti démocrate [il avait voté pour Pete Buttigieg], vient de basculer vers le Parti républicain et a pris parti pour Nikki Haley.
Ouvrir en mode plein écran Nikki Haley veut tirer profit du vote anti-Trump parmi les républicains, fatigués de l’omniprésence de l’ex-président. Elle a les connaissances nécessaires pour la gestion d’un véritable gouvernement d’État. Ce sont les qualités que je lui reconnais, et si je suis prêt à prendre le risque, je pense qu’elle est la meilleure pour aller de l’avant , dit-il. Passionné de politique, il s’engage à voter pour elle lors des caucus. La meilleure chose que je puisse faire, c’est de faire passer le message et de soutenir Nikki Haley, jusqu’à la fin.
Si jamais, Trump était choisi, Calder Parrott devra se résigner à voter pour Joe Biden, même s’il croit qu’il est devenu trop vieux pour la présidence. Des caucus pas si fiables que ça Cela fait des semaines que les citoyens de l’Iowa sont bombardés de publicités électorales, la plupart négatives, sur toutes les plateformes. Leurs votes sont très convoités, mais les caucus de l’Iowa sont-ils aussi importants que ça dans cette course à la Maison-Blanche?
La réponse du professeur Dennis Goldford est on ne peut plus claire. Je dis toujours que les caucus sont un événement essentiellement dénué de sens, mais dont l’impact politique est considérable. La participation aux caucus n’est normalement pas très bonne, explique-t-il. Seulement 20 % en moyenne des électeurs éligibles participent effectivement aux caucus. Il rappelle d’ailleurs qu’en 2016, les républicains de l’Iowa avaient préféré Ted Cruz, le sénateur du Texas, à Donald Trump, qui a cependant remporté la course pour le 1600 Pennsylvania Avenue .
En 2012, l’Iowa avait voté pour Rick Santorum, alors que le candidat choisi au niveau national fut Mitt Romney. Et puis, si l’on remonte dans les dernières décennies, les caucus de l’État ont sélectionné seulement trois candidats qui sont effectivement devenus présidents : Carter en 1972, Bush fils en 2000 et Obama en 2008. Trump sous pression Pour l’instant, le signal est plutôt bon pour Donald Trump, en tout cas si l’on fait confiance aux sondages qui lui donnent une confortable avance de 36 points sur sa plus proche adversaire, Nikki Haley.
Ouvrir en mode plein écran Donald Trump fils espère que les partisans braveront en masse le froid polaire de l’Iowa. Photo : Radio-Canada / Frédéric Arnould Jeudi après-midi, une soixantaine de supporteurs de Trump ont répondu présents dans un restaurant de la région de Des Moines. Ils sont venus écouter Donald Trump fils, délégué par son père qui comparaissait ce jour-là à l’un de ces procès à New York. La rhétorique est identique à celle de son père : [Joe] Biden est le pire président, le rêve américain n’est plus ce qu’il était, et les médias essaient de créer un narratif d’échec pour Trump.
Ce n’est pas facile d’être conservateur, c’est moins facile de s’exprimer à ce sujet. Mais c’est beaucoup plus difficile d’être un conservateur qui soutient Trump, mais ce pour quoi nous nous battons tous en vaut la peine, c’est tellement important. Parmi les plus fidèles partisans de l’ex-président, on compte Lynne Mona qui épouse la cause de DonaldTrump jusqu’au bout.
En fait, je ne crois pas qu’il ait perdu en 2020, je pense que l’élection lui a été volée, et je pense que nous allons le découvrir très bientôt , affirme-t-elle, en dépit de la soixantaine de recours devant les tribunaux qui ont tous prouvé le contraire. Elle croit aussi que Donald Trump ne sera pas reconnu coupable lors des procès et que toute cette cabale, c’est juste le « Deep State », l’État profond, qui veut avoir sa peau. Ouvrir en mode plein écran Les produits dérivés de la campagne de Donald Trump feront-ils encore recette lors des caucus et primaires ?
Arnould Finissons-en tôt et finissons-en en force , conclut Donald Trump Junior, applaudi par ses partisans. Il espère que ces fidèles se déplaceront en masse, car la pression est forte. Je pense qu’en ce moment, Trump est plus préoccupé par la satisfaction des attentes qu’il ne l’est en réalité par Haley ou DeSantis, explique Dennis Goldford de l’Université Drake.
Si Trump récoltait 40 % ou moins, ce serait un peu comme un feu jaune clignotant pour sa candidature et si Haley ou DeSantis dépassaient les attentes de manière significative, ce serait un signe très positif pour eux. Le sondage final du journal Des Moines Register, à deux jours des caucus de l’Iowa, a montré un léger tassement des appuis de Trump (qui reste largement en tête, à 48 %) et une montée constante de Haley à 20 %, devant DeSantis à 16 %.
La mobilisation de lundi sera déterminante, par -30 degrés Celsius. Il ne reste maintenant que quelques heures avant de connaître le résultat des caucus de l’Iowa. Une seule chose est sûre, ce seront les conditions météorologiques qui mettront à l’épreuve la volonté réelle des partisans de chaque candidat qui devront se déplacer lundi soir pour une bonne partie de la soirée afin de voter pour leur poulain républicain.
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