L’UE privilégie un accord de paix global avant tout cessez-le-feu en Ukraine

EU flags in front of European Commission
EU flags in front of European Commission

Des garanties de sécurité pour Kiev et des divergences transatlantiques alimentent les tensions géopolitiques

L’Union européenne ne souhaite pas qu’un cessez-le-feu soit annoncé entre l’Ukraine et la Russie avant qu’un accord de paix complet ne soit conclu. C’est ce qu’a rapporté mardi l’agence Reuters, citant un haut fonctionnaire européen qui a requis l’anonymat. Selon cette source, les Vingt-Sept considèrent qu’un cessez-le-feu inconditionnel serait « dangereux » s’il n’était pas lié à une solution politique solide et durable.

Un sommet d’urgence à Paris

Plusieurs membres de l’UE ont exprimé cette position lors d’un sommet d’urgence convoqué lundi à Paris par le président français Emmanuel Macron, juste après l’annonce de Washington sur le lancement « immédiat » de négociations de paix entre les États-Unis et la Russie. Ces négociations, qui se tiennent à Riyad, en Arabie saoudite, se déroulent sans la participation de l’Ukraine ni de l’Union européenne, provoquant un vif mécontentement au sein de la classe politique européenne.

Le sommet parisien a réuni les chefs d’État et de gouvernement de l’Allemagne, du Royaume-Uni, de l’Italie, de la Pologne, de l’Espagne, des Pays-Bas et du Danemark, ainsi que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte.

Un haut fonctionnaire européen, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a expliqué : « Nous estimons qu’il est dangereux d’aboutir à un cessez-le-feu qui ne serait pas accompagné d’un accord de paix. » Il a par ailleurs souligné la disposition de l’UE à offrir à l’Ukraine les garanties de sécurité nécessaires pour entamer un véritable processus de paix, sans toutefois préciser la forme que prendraient ces garanties.

Les aspirations de Kiev et l’exigence de l’OTAN

Depuis le début du conflit, Kiev réclame l’intégration dans l’OTAN comme assurance de sécurité face à la Russie, une idée fermement rejetée par Moscou qui considère l’expansion de l’Alliance atlantique comme l’une des causes majeures de la guerre en Ukraine. Washington a d’ailleurs refusé cette demande ukrainienne la semaine dernière, insistant sur le fait qu’elle ne pouvait pas être satisfaite tant que le conflit était en cours.

« Nous sommes prêts à fournir des garanties de sécurité, dont les modalités devront être définies en concertation avec chaque partie, et en tenant compte du niveau de soutien américain », a poursuivi l’officiel européen. D’un point de vue géopolitique, il s’agit pour l’UE d’éviter un accord qui gèlerait la situation sur le terrain mais ne résoudrait pas les questions de souveraineté et d’intégrité territoriale ukrainiennes.

Les mises au point de Macron

Emmanuel Macron, dans un message posté sur X (ex-Twitter) après le sommet de Paris, a confirmé l’analyse de l’UE : « Une paix forte et durable en Ukraine doit s’accompagner de garanties de sécurité solides et crédibles. » Il a appelé l’UE, les États-Unis et l’Ukraine à « collaborer » dans le cadre des efforts de paix, affirmant que cette unité transatlantique était « la clé » pour mettre un terme au conflit.

Des négociations exclusives et des divisions au sein de l’UE

La réunion organisée par Emmanuel Macron intervient au lendemain des déclarations de Keith Kellogg, émissaire spécial du président Trump pour l’Ukraine. Ce dernier a clairement indiqué que l’UE ne serait pas invitée à prendre part aux pourparlers bilatéraux entre les États-Unis et la Russie. Beaucoup de responsables européens ont vertement critiqué ce choix, rappelant que le conflit ukrainien avait un impact direct sur la sécurité et la stabilité du continent européen.

Cependant, l’ensemble des États membres ne parle pas d’une seule voix. Le ministre hongrois des Affaires étrangères, Péter Szijjártó, a qualifié sur Facebook les dirigeants réunis à Paris de « va-t-en-guerre », estimant qu’« ils n’ont pas leur place » dans des efforts visant à instaurer la paix. La Hongrie, qui entretient des relations plus pragmatiques avec Moscou et s’oppose régulièrement aux sanctions européennes contre la Russie, illustre les profondes fractures qui existent au sein de l’UE concernant la gestion de ce conflit.

La réaction de Moscou

Mardi, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a qualifié les critiques européennes à l’encontre des négociations américano-russes de Riyad de « réaction nerveuse, proche de la panique » et d’« événement sans précédent dans les relations internationales ». Pour Moscou, les réticences européennes confirment la volonté des Occidentaux de peser davantage dans un règlement dont ils se sentent exclus, tout en craignant un accord qui marginaliserait l’UE ou qui ne tiendrait pas compte des intérêts de Kiev.

Sur le plan géopolitique, cette discorde met en évidence les tensions persistantes entre, d’un côté, la volonté américaine d’agir en puissance majeure capable de négocier directement avec la Russie, et, de l’autre, le désir de l’Union européenne de faire prévaloir la solidarité entre États membres et de jouer un rôle de premier plan dans la sécurité de son propre continent. La question des garanties de sécurité à l’Ukraine demeure centrale, tout comme l’exigence d’une solution globale traitant les points litigieux – notamment la souveraineté de l’Ukraine sur les territoires contestés et le statut de cette dernière vis-à-vis de l’OTAN et de l’UE.

Enjeux et perspectives

Alors que les négociations de Riyad se poursuivent, le fossé semble se creuser entre les États-Unis et l’UE sur la manière de gérer la crise. Sur le terrain, les combats continuent de déstabiliser la région, aggravant la crise énergétique et les préoccupations économiques dans l’ensemble des pays européens. De nombreux observateurs estiment que l’issue de ce conflit aura des répercussions durables sur la stabilité du continent et sur l’architecture de sécurité transatlantique.

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Dans ce contexte, l’UE tente de faire valoir sa vision d’une sortie de crise par la négociation, tout en évitant qu’un simple cessez-le-feu ne conduise à un conflit gelé. De son côté, Washington, en première ligne dans les discussions avec Moscou, cherche une avancée rapide, mais devra composer avec les intérêts et les attentes de ses alliés européens. L’issue de cette séquence diplomatique reste donc incertaine, à l’image des bouleversements que la guerre en Ukraine continue de provoquer sur la scène internationale.

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