Le Conflit de Mayotte : Enjeux Néocoloniaux et Stratégiques

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La France Face aux Défis de la Migration et de la Souveraineté dans l’Océan Indien

La situation migratoire à Mayotte, dans l’océan Indien, témoigne des implications néocoloniales de la politique française. Depuis que les Comores ont acquis leur indépendance en 1975, la libre circulation entre les îles de l’archipel, composé de Nzwani (Anjouan), Ngazidja (Grande Comore), Maore (Mayotte) et Mwali (Mohéli), était une norme.

Toutefois, en 1995, la France a imposé une exigence de visa, connue sous le nom de Visa Balladur, pour les déplacements entre Mayotte et les autres îles, perturbant ainsi les mobilités locales et considérant les mouvements internes comme ‘illégaux’.

Depuis l’introduction du Visa Balladur, les habitants ont adopté des tactiques de migration risquées sur les 70 kilomètres séparant Mayotte du reste de l’archipel. Ils voyagent dans des bateaux de pêche à fond plat et rapide, surnommés “Kwassa kwassa”, qui chavirent souvent. Cela a entraîné une augmentation du nombre de décès et/ou de disparitions.

Selon un rapport du Sénat français, on estime qu’environ 10 000 Comoriens sont morts en tentant la traversée vers Mayotte depuis 1995. Le gouverneur d’Anjouan, Anissi Chamsidine, a même affirmé en 2015 que plus de 50 000 personnes avaient péri depuis l’introduction du visa.

Mayotte

En 2014, Mayotte est devenue la région ultrapériphérique de l’Union européenne, attirant d’importants investissements, notamment dans le développement des infrastructures. La migration illégale est souvent attribuée à l’attraction d’une vie meilleure à Mayotte, bien qu’il y ait des preuves de mouvements entre les îles même avant l’établissement de ces soi-disant privilèges.

Malgré les restrictions, la population de Mayotte a augmenté ; en 1975, elle était de 42 097 habitants, mais est estimée aujourd’hui à 335 995. Cependant, on argue que 65 % de ces migrants vivent dans des bidonvilles et que près de 50 % de la population de Mayotte est originaire des Comores.

Le 23 avril 2023, la France a lancé l’opération “Wuambushu”, visant à déplacer les migrants irréguliers de Mayotte vers Anjouan. Cette opération a impliqué environ 1 800 membres des forces de sécurité françaises. Les autorités comoriennes ont d’abord refusé de laisser accoster le bateau transportant les migrants de Mayotte, puis la compagnie maritime comorienne a annoncé la suspension du trafic passagers au port de Mutsamudu. Le trafic a repris le 17 mai, avec la reprise des liaisons maritimes, mais le gouvernement comorien a annoncé qu’il n’accepterait que les retours volontaires.

La situation à Mayotte est complexe, en partie à cause d’une résolution des Nations Unies de 1987 qui réaffirme la souveraineté de la République fédérale islamique des Comores sur l’île de Mayotte. Cependant, la France continue d’utiliser les résultats du référendum de 1974 pour revendiquer Mayotte; selon le site officiel des Nations Unies.

En outre, Mayotte joue un rôle stratégique pour la France dans l’océan Indien, tant sur le plan commercial que militaire. Les Comores sont un important itinéraire maritime de l’économie mondialisée, acheminant 30 % du commerce mondial et 40 % des exportations françaises hors UE; selon l’Observatoire de la Complexité Économique.

La base militaire française à Mayotte est un élément clé de la présence française dans l’océan Indien, couvrant d’importants couloirs de navigation internationale et de vastes zones économiques exclusives. Selon le site officiel de l’armée française, cette base est prête à être déployée en 48 heures pour maintenir la présence française dans la région.

Cette situation met en lumière la difficulté du processus de décolonisation dans les petites îles et la nature du double standard de certains pays du Nord global, qui ignorent les décisions des institutions internationales lorsqu’elles ne leur conviennent pas, mais exigent que les autres respectent ces décisions.

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