Dans la capitale, cinq millions d’habitants vivent pour la quatrième semaine consécutive barricadés chez eux, par peur des balles perdues.
Sans eau ni électricité, avec des stocks de nourriture quasiment à sec et de moins en moins d’argent en poche, ils survivent sous une chaleur écrasante grâce à des réseaux de solidarité entre voisins et proches.
Le réseau téléphonique ou internet va et vient au gré des efforts des compagnies de télécommunications qui peinent à trouver du carburant pour faire tourner les générateurs.
Les affrontements opposent depuis le 15 avril l’armée d’Abdel Fattah al-Burhane aux redoutés paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) de Mohamed Hamdane Daglo, deux généraux qui avaient mené ensemble un putsch en 2021 mais se battent aujourd’hui pour le pouvoir.
Les nombreuses trêves annoncées n’ont quasiment pas été respectées et l’ONG Acled dénombre déjà plus de 750 morts dans le pays, et les autorités soudanaises 5.000 blessés.
Un résident du sud de Khartoum raconte lundi à l’AFP « entendre des raids aériens du côté d’un marché dans le centre-ville ».
– Pas de « progrès majeurs » –
De l’autre côté de la mer Rouge, à Jeddah en Arabie saoudite, les émissaires des deux camps sont censés négocier une trêve.
Ces « pré-discussions » sont uniquement « techniques », tempèrent depuis plusieurs jours les négociateurs soudanais et internationaux.
Elles ne concernent aucun volet politique dans un pays en plein marasme depuis le putsch de 2021.
Elles se limiteront, assurent les experts, à dégager des corridors sécurisés pour l’aide humanitaire qui arrive sur la côte est, à Port-Soudan, afin de nourrir et soigner les civils pris au piège à Khartoum et au Darfour, autre région très touchée par les affrontements, située dans l’ouest frontalier du Tchad.
Dans ces deux zones, quasiment plus aucun hôpital ne fonctionne et les réserves humanitaires ont été bombardées ou pillées dans leur majorité.
« Les principaux locaux du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été pillés », a affirmé lundi Farhan Haq, le porte-parole du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres. Il a dénoncé des pillages « massifs » dans un pays où, avant la guerre, un Soudanais sur trois souffrait déjà de la faim.
« Notre priorité est de parvenir à un cessez-le-feu durable » et de permettre l’accès de l’aide humanitaire, a déclaré de son côté l’ambassadeur américain au Soudan John Godfrey.
Malgré l’urgence humanitaire, les discussions à Jeddah n’ont pour le moment pas débouché sur des « progrès majeurs », affirme à l’AFP un diplomate saoudien au deuxième jour des discussions.
Selon un fonctionnaire de l’ONU, le responsable de l’ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths, arrivé dimanche à Jeddah, a demandé à y participer.
Pour Kholood Khair, spécialiste du Soudan, le manque de résultat n’est pas surprenant. Avec ces pourparlers, les deux camps cherchent surtout « à s’attirer les bonnes grâces des Saoudiens et des Américains, plutôt que d’arriver à un accord », dit-elle à l’AFP.
De plus, les partisans d’un pouvoir civil, écartés depuis le putsch et qui font le lien avec les humanitaires sur le terrain, ne sont pas représentés à Jeddah.
Tout comme les acteurs qui pourraient changer la donne, note-t-elle, en référence aux Emirats arabes unis, grands alliés de Daglo, et l’Egypte, partenaire historique de l’armée soudanaise.
Ces deux pays « sont les seuls qui sont parvenus jusqu’ici à arracher une trêve et à la faire respecter, dit-elle.
– Vaste exode –
Parallèlement aux Américains et Saoudiens, l’Union africaine –qui a suspendu le Soudan en 2021 et n’a donc plus de grands leviers de pression– et l’Igad, le bloc régional d’Afrique de l’Est dont fait partie le pays, tentent d’organiser des discussions sous l’égide du président du Soudan du Sud, Salva Kiir.
Ce dernier a reçu lundi à Juba un émissaire du général Burhane, pour qui les discussions de Jeddah ne diminuent pas « le rôle que l’Igad et le président Salva Kiir » pourrait jouer dans les négociations entre les deux généraux.
Les combats ont provoqué un vaste exode des habitants des régions touchées, l’ONU parlant de 335.000 déplacés et 117.000 réfugiés.
En pleine crise économique, l’Egypte a accueilli plus de 65.000 réfugiés soudanais.
Son chef de la diplomatie Sameh Choukri était lundi au Tchad, où il a alerté sur « la tragédie humaine » du conflit et son « impact direct sur les pays voisins », avant de rejoindre le Soudan du Sud, un autre voisin du Soudan, qui a accueilli, avec le Tchad, plus de 57.000 personnes fuyant la guerre.
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