Burundi : « Comme il ne cède pas, ils vont le laisser mourir en prison ! »

Burundi : « Comme il ne cède pas, ils vont le laisser mourir en prison ! »

Caramba, encore raté ! Le pouvoir des généraux burundais espérait en finir une fois pour toutes avec la résistance des actionnaires de l’hôpital Kira de Bujumbura. Un établissement inauguré en 2015 en grande pompe et devenu rapidement une référence en matière de soins de santé dans l’ancienne capitale mais aussi dans tout le pays et même au-delà puisqu’il attire de nombreux patients venus de la République démocratique du Congo voisine.

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Des patients particulièrement appréciés dans un pays en perpétuelle recherche de devises étrangères. Le succès de l’hôpital, fruit d’un partenariat public-privé, avec des actionnaires majoritaires venus de suisse, n’a pas tardé à attirer l’attention du pouvoir après l’arrivée à la tête de l’État du général Évariste Ndayishimiye, alias “Neva”. L’homme a succédé à Pierre Nkurunziza. Le directeur général de l’hôpital, le docteur Christophe Sahabo, était un proche de l’ancien régime. Si le pouvoir est resté entre les mains du CNDD-FDD, les amitiés diffèrent. Et le docteur Sahabo ne tardera pas à subir la pression de l’équipe de Neva qui, rapidement, a cherché à accaparer des business juteux. Pas toujours avec succès, comme l’a montré la profonde pénurie de carburant dans tout le pays cet été, après que les amis du président ont tenté de se substituer au principal importateur d’or noir du pays. Avant de devoir enclencher un grand rétropédalage cet automne vu la paralysie du pays.

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Plus de sept mois de détention arbitraire

Pas question pour l’instant d’une marche arrière des généraux dans le dossier de l’accaparement de l’hôpital Kira. Le directeur général, le docteur Sahabo a été arrêté le 1er avril dernier. Plus de sept mois après son arrestation, l’homme, toujours en détention préventive, n’a pas encore comparu devant un juge. Pire, il a été déplacé de la prison de Bujumbura à celle de Ruyigi, dans l’extrême est du pays. Loin des siens. “Dans un pays où sans le soutien de vos proches, vous ne recevrez pas de nourriture, il y a de quoi être très inquiet”, explique un proche du dossier sous couvert d’anonymat, “la répression menée par ce régime nous contraint à une prudence absolue”. “Le pouvoir en place a tenté de s’imposer à la tête du conseil d’administration. Le nouveau CA ad interim a même commandé un audit pour tenter de démontrer les malversations financières du docteur Sahabo et ainsi justifier son incarcération”, explique une autre source tout aussi prudente. L’audit, dont les résultats ont été publiés le 19 octobre, a conclu à la bonne gestion de l’équipe originelle…

Pourtant, malgré ce travail, malgré un courrier, du 25 octobre, des actionnaires majoritaires au chef de l’État appelant à la libération du docteur et à sa réintégration à la tête de l’hôpital, rien n’a changé. “Ils ont fait marche arrière sur l’essence parce que leur survie était en jeu. Il faut craindre pour le docteur Sahabo que, sans une mobilisation internationale, les généraux ne céderont pas une seconde fois. Ils vont le laisser mourir en prison”.

Le nouveau Premier ministre Gervais Ndirakobuca, désigné à ce poste le 7 septembre, ancien patron des services de renseignement burundais a vu l’Union européenne lever les sanctions qui pesaient contre lui le jour même de l’envoi du courrier des actionnaires du Kira, pas de quoi le motiver à infléchir la position officielle dans ce dossier.

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