Porto Rico
Ariel Veles Torres n’est pas peu fier de la petite place de la municipalité d’Adjuntas, dans le sud-ouest de Porto Rico, un endroit vibrant où trônent une fontaine et des bancs, entouré d’une église et de l’hôtel de ville. Pas de doute, les vestiges du colonialisme espagnol y sont évidents. Jusqu’en 1898, c’est en effet l’Espagne qui dirigeait Porto Rico.
Cette île est devenue un territoire du Commonwealth des États-Unis cette année-là, lorsqu’ils l’ont acquise au cours de la guerre hispano-américaine. À 24 ans, Ariel Veles Torres se sent fondamentalement américain. Il se lance en politique cette année pour que Porto Rico devienne un État comme les 50 autres. Ouvrir en mode plein écran Ariel Veles Torres est candidat aux élections de novembre prochain pour représenter le territoire de façon symbolique.
C’est la deuxième fois que je brigue la délégation fantôme au Congrès, dit-il, et c’est symbolique. Symbolique, car, comme Porto Rico est un territoire américain et non un État, ses habitants ne sont représentés par aucun élu au Congrès; ils n’ont ni sénateur ni représentant. Pas de droit de vote suprême Alors qu’on parle beaucoup, ces jours-ci aux États-Unis, des primaires en vue de la présidentielle de novembre prochain, l’île, comme d’autres territoires, organise des élections primaires au printemps, lors desquelles les partis choisissent les délégués aux conventions nationales républicaine et démocrate.
Bien que ces délégués votent pour le candidat qu’ils ont choisi lors de leur convention respective, cela marque la fin de la participation du territoire à l’élection présidentielle puisque ses habitants ne peuvent pas voter aux élections présidentielles américaines. Ouvrir en mode plein écran L’ancien sénateur local Jose Garrica Pico donne des cours de science politique à l’Université de San Juan.
Pour l’ancien sénateur local Jose Garrica Pico, qui enseigne la science politique à l’Université de San Juan, la capitale portoricaine, le sujet de l’avenir de Porto Rico revient constamment sur la table dans sa classe. Les Portoricains ne sont pas traités sur un pied d’égalité en vertu de la Constitution, explique-t-il. Cela concerne notamment l’aide économique au gouvernement et les avantages sociaux. Cette situation d’inégalité cause un exode des insulaires.
Il y aurait aujourd’hui six millions de Portoricains qui vivent hors de leur île, alors qu’un peu plus de trois millions y résident. Un phénomène que constate Ariel Veles Torres jour après jour. J’ai vu ma famille partir aux États-Unis parce qu’il n’y a pas de possibilités dans l’île. Mes grands-parents, par exemple, vivent maintenant en Pennsylvanie pour avoir de meilleures prestations de sécurité sociale.
Républicains et démocrates unis contre le projet Il y a eu plusieurs référendums sur la possibilité pour Porto Rico de devenir un État américain. Une majorité de Portoricains ont appuyé ce projet. Toutefois, pour que l’île puisse devenir un État, le Congrès américain doit donner son accord. Au Sénat, par exemple, il faudrait que 60 sénateurs sur 100 soient d’accord, un appui presque impossible à obtenir dans le contexte de division politique actuel. Ouvrir en mode plein écran La population de Porto Rico souhaiterait faire partie des États-Unis en tant que citoyens d’un État.
Le professeur Garrica Pico déplore cet immobilisme de Washington. Le Congrès trouve chaque fois une excuse différente pour ne rien faire face au désir des habitants de Porto Rico. Pour l’instant, ce sont les républicains qui bloquent le dossier, mais les démocrates ont fait de même à d’autres moments. Ariel Veles Torres pense que cette crainte de Washington a trait à l’équilibre des pouvoirs au Congrès. C’est un argument avancé en particulier par les républicains, qui disent que Porto Rico serait un État bleu, ce qui n’est pas nécessairement le cas.
Je ne crois pas que Porto Rico serait un État rouge ou bleu, je crois que Porto Rico serait plutôt un État en mouvement. C’est le message que j’essaie de faire passer aux législateurs lorsque je me rends à Washington pour faire du lobbying , explique-t-il. Et la souveraineté? Ceux qui se contentent du statut de Porto Rico comme simple territoire ne voient pas d’issue à ce dossier. Dans son salon de coiffure qui semble figé dans le temps sur l’île de Vieques, Hector Legrand discute avec un de ses clients de l’avenir de son territoire.
Certains Portoricains sont en faveur du statu quo pour leur territoire. Si je devais choisir, je préférerais que Porto Rico devienne un État américain à part entière plutôt que de devenir un pays indépendant , dit M. Legrand. Cette affirmation fait bondir Ariel Veles Torres. L’indépendance est une meilleure option que de rester une colonie. N’empêche, l’idée de créer un État souverain a la vie dure sur l’île parce que, entre autres, une partie ou la totalité des Portoricains perdraient probablement la citoyenneté américaine et le droit de résider aux États-Unis. Résultat : l’appui à l’indépendance est faible parce qu’elle semble irréaliste pour nombre de gens.
La Jamaïque est à peu près de la même taille que Porto Rico, alors que la République dominicaine représente trois fois notre taille avec la même population, donc nous pourrions devenir, nous aussi, une nation. Mais c’est difficile de séparer Porto Rico de l’économie américaine, et il est très difficile de maintenir le niveau de vie que nous avons et le mode de vie dont nous jouissons actuellement , explique le professeur Jose Garrica Pico.
Ariel Veles Torres se présente aux élections de l’île cette année comme représentant des Portoricains, une fonction symbolique. D’où l’urgence de changement pour le jeune aspirant politicien Ariel Veles Torres, impatient de porter prochainement la cause au Congrès avec les autres délégués portoricains. La situation actuelle ne fonctionne plus. C’était censé être un statut transitoire et cela fait maintenant plus de 75 ans que rien ne change.
Il est temps de passer à autre chose. Il espère que la diaspora portoricaine fera des pressions dans les 50 États pour que l’île puisse enfin obtenir une étoile sur le drapeau, comme ce fut le cas pour Hawaï et l’Alaska, qui sont devenus des États il y a quelques décennies.
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