Gabriel Attal
Si l’expression est souvent utilisée, cette fois-ci, elle semble appropriée. C’est un réel changement de garde auquel ont assisté les Français devant le parvis de Matignon, la résidence des premiers ministres. À 34 ans, Gabriel Attal est devenu le plus jeune premier ministre de la Ve république, prenant la place d’Élisabeth Borne, 62 ans.
Celle qui a été la deuxième femme à occuper la fonction avait démissionné la veille, laissant clairement comprendre que c’est son patron, le président Emmanuel Macron, qui l’avait poussé vers la sortie. Emmanuel Macron mise donc sur ce proche collaborateur, pour donner un nouveau souffle à un deuxième mandat, notamment marqué par des réformes controversées.
Sur le réseau X, le chef de l’État a confirmé miser sur le jeune politicien pour mettre en œuvre un projet de régénération . Il faut dire que Gabriel Attal dispose d’une popularité dont le président pourrait aujourd’hui rêver. Un sondage de la firme IFOP , publié en novembre, montrait qu’il était la deuxième personnalité politique qui disposait du plus d’opinions favorables à 51 %, quelques points derrière l’ancien premier ministre Édouard Philippe.
Cet ancien porte-parole du gouvernement, habile communicateur de l’aveu même de certains de ses adversaires, a su s’imposer au cours des derniers mois sur la scène politique française. À la tête du complexe ministère de l’Éducation nationale, Gabriel Attal n’a pas hésité à s’attaquer à des dossiers sensibles. Ouvrir en mode plein écran Gabriel Attal et l’ancienne première ministre Élisabeth Borne, au moment de la passation des pouvoirs, à Paris, mardi.
En septembre, il a confirmé l’interdiction à l’école du port de l’abaya, une robe longue portée par certaines femmes musulmanes. Cette décision, qui lui a attiré des critiques notamment à gauche, reçoit néanmoins l’appui de plus de 80 % des Français, selon un sondage IFOP publié peu après la rentrée, en septembre.
À la tête du ministère de l’Éducation, Gabriel Attal a aussi accordé beaucoup d’importance au dossier du harcèlement scolaire, allant jusqu’à réclamer une procédure disciplinaire à l’endroit de l’ancienne dirigeante d’un établissement où un élève harcelé s’est enlevé la vie. Mais ce passage à l’Éducation, souligné par plusieurs observateurs et alliés politiques, ne lui attire pas que des éloges.
Âge réel de Gabriel Attal : 34 ans […] L’âge ressenti, c’est 80 ans , a par exemple lancé le député écologiste Benjamin Lucas, rappelant que le nouveau chef du gouvernement s’est montré favorable au port de l’uniforme à l’école et à une forme d’austérité budgétaire, des idées qu’il qualifie de ringardes . Des défis persistants à l’horizon Chose certaine, l’arrivée de ce nouveau locataire à Matignon, la résidence officielle des premiers ministres, ne se fera pas sans défi.
La popularité de Gabriel Attal auprès de l’opinion publique ne change rien à la composition de l’Assemblée nationale, qui demeure inchangée. Comme Élisabeth Borne avant lui, le nouveau premier ministre devra donc tenter d’imposer les priorités du président sans majorité absolue. Contrairement à sa prédécesseure, le nouveau chef de gouvernement semble davantage intéressé par la joute politique. Il est dans l’ultra maîtrise des codes.
Il est dans sa zone de confort dans la vie politique , a affirmé sur Franceinfo l’ancienne ministre Marlène Shiappa. Un avantage qui pourra peut-être l’aider à forger les alliances nécessaires en vue d’adopter des projets de loi, une tâche qui s’annonce néanmoins ardue. Les partis de gauche, dont est pourtant issu Gabriel Attal, lui qui a été adjoint d’une ministre socialiste sous François Hollande, ne cachent pas leur scepticisme quant au changement à la tête du gouvernement.
À droite, le parti Les Républicains, souvent courtisé par Emmanuel Macron, ne s’est pas montré un allié aussi fiable que l’aurait souhaité le président. L’avantage dont bénéficie Gabriel Attal est que les réformes controversées, en matière de retraites et d’immigration, sont chose du passé. N’empêche, en cette année olympique, le travail du gouvernement sera scruté à la loupe, et même au-delà des frontières de la France. Puis, certains dossiers sensibles, comme celui de l’aide médicale à mourir, pourraient aussi s’inviter dans les priorités législatives.
Autre facteur qui ne change pas : le premier ministre dispose d’un pouvoir somme toute limité, dans la mesure où les grandes décisions viennent d’en haut, de l’Élysée. Si Élisabeth Borne a été le visage à l’Assemblée nationale de l’imposition, parfois même sans vote, de réformes controversées, elle ne faisait que mettre en application la mission que le président lui avait confiée. Ainsi, même s’il veut laisser sa marque sur la fonction, Gabriel Attal est destiné à être étroitement lié à la politique d’un président largement plus impopulaire que lui, selon les sondages.
La France est une maison qui est délabrée, il faut changer les fondations et aujourd’hui on est en train de débattre si on doit refaire la peinture en magenta ou en bleu cyan , ironisait par exemple le député Louis Boyard, du parti de la France insoumise sur un plateau de télévision. Avant même de juger de l’impact de sa nomination sur ses ambitions politiques, dans l’éventualité où il décidait de se porter candidat aux élections présidentielles de 2027, Gabriel Attal sera confronté à un premier rendez-vous électoral dans quelques mois.
En juin, les citoyens des pays membres de l’Union européenne seront appelés aux urnes pour renouveler la composition du Parlement européen. Si Gabriel Attal ne sera pas lui-même directement confronté au choix des électeurs, la liste du président Macron, le parti Renaissance, le sera.
Et les derniers sondages montrent que le Rassemblement national de Marine Le Pen, dont le président Jordan Bardella est encore plus jeune que Gabriel Attal, dispose aussi d’une grande popularité. Le nouveau premier ministre, le quatrième à occuper ce poste depuis la première victoire d’Emmanuel Macron en 2017, n’a donc que quelques mois pour redonner de la vigueur au quinquennat du président. Quelques mois pour convaincre les électeurs que ce changement de garde n’est pas qu’un revêtement de façade à Matignon.
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