Boeing
Après qu’un hublot se fut détaché de la carlingue d’un avion d’Alaska Airlines qui venait de décoller de l’aéroport de Portland, dans l’Oregon, le vendredi 5 janvier en soirée, l’Agence fédérale américaine de l’aviation civile a ordonné samedi l’inspection immédiate de 171 appareils 737 MAX 9 de Boeing, suspendus de vol d’ici là.
La directive de l’Agence fédérale américaine de l’aviation civile impose aux exploitants [des compagnies aériennes] d’inspecter les appareils avant un nouveau vol , a indiqué cette agence dans un communiqué, disant estimer que cette opération nécessite entre quatre et huit heures par avion.
La compagnie Alaska Airlines avait elle-même décidé de clouer au sol toute sa flotte de Boeing 737 MAX 9, soit 65 appareils, immédiatement après cet incident qui ravive les inquiétudes au sujet de la sécurité des 737 MAX. 18 appareils ont été jugés sécuritaires et ont repris leurs activités aujourd’hui, tandis que les autres avions subissent toujours des vérifications.
Elle a depuis lors indiqué, sur le réseau social X (ex-Twitter), que plus du quart de sa flotte de 737 MAX 9 avait été inspectée depuis l’incident et dit n’avoir pas trouvé, à ce stade-ci, d’élément préoccupant . Selon des données communiquées par Boeing à l’ AFP , 218 exemplaires du 737 MAX 9 ont été livrés à ce jour. United Airlines et Alaska Airlines possèdent les flottes les plus imposantes de ces appareils. Les compagnies Icelandair et Turkish Airlines en utilisent également.
Le concurrent Aeromexico a, lui, décidé de clouer au sol tous ses 737 MAX 9 jusqu’à ce que les vérifications aient été effectuées. De son côté, le transporteur européen Icelandair a précisé qu’aucun de ses 737-9 ne correspondait à la configuration concernée par la directive de l’Agence fédérale américaine de l’aviation civile ( FAA) . Aucune victime n’est à déplorer parmi les 171 passagers et les six membres d’équipage du vol 1282 d’Alaska Airlines, indique un communiqué de la compagnie aérienne.
Après le détachement du hublot et le signalement par l’équipage d’un problème de pressurisation , l’appareil est revenu à son point de départ pour un atterrissage d’urgence. Même si ce type d’incident est rare, notre personnel de bord était entraîné et préparé à gérer en toute sécurité cette situation , précise le communiqué d’Alaska Airlines.
Erreur de conception?
Le MAX – qui existe actuellement en trois versions : les 8, 9 et 10, qui diffèrent principalement par leur taille – est la dernière version du vénérable 737 de Boeing, un avion bimoteur monocouloir fréquemment utilisé pour les vols intérieurs américains. Il y a plus de dix ans, Boeing envisageait de concevoir et de construire un avion entièrement nouveau pour remplacer le 737.
Toutefois, craignant de perdre des ventes devant son rival européen Airbus, qui commercialisait une version plus économe en carburant de son A320 de taille similaire, Boeing a décidé de prendre un chemin plus court pour peaufiner le 737, ce qui a entraîné la naissance du MAX. La directive de la FAA concerne d’ailleurs les modèles avec la porte du milieu bouchée , selon le document publié sur son site.
Selon plusieurs spécialistes qui se sont penchés sur ce modèle, notamment le responsable du site spécialisé « The Air Current », Jon Ostrower, il semble que le MAX possède une porte condamnée et masquée par une cloison qui ne laisse apparaître qu’un hublot, ce qui serait à l’origine de l’accident. De son côté, le spécialiste aéronautique Xavier Tytelman est aussi d’avis que cet incident pourrait révéler un défaut de conception de l’appareil plutôt qu’un problème lié à la maintenance.
Étant donné que l’avion a été livré il y a à peine un mois et demi à la compagnie Alaska Airlines, nous avons certainement [affaire à] un défaut de conception. Il est très probable que des investigations identiques soient réalisées sur tous les avions de cette catégorie [MAX 9] partout dans le monde et pas uniquement sur les appareils d’Alaska Airlines , explique-t-il. Pas un problème au Canada En réaction à cet incident, les compagnies aériennes canadiennes ont affirmé que leur flotte ne compte pas d’appareils 737 MAX 9 de Boeing.
Les transporteurs canadiens comme Air Canada, WestJet, Flair Airlines ou Lynx Air disent avoir des 737 MAX 8 dans leur flotte, un modèle qui ne comporte pas de porte de sortie à la mi-cabine, contrairement au MAX 9. Air Canada précise que ses 40 appareils de la série 737 MAX 8 seraient très sûrs en vol. Du côté de WestJet, la porte-parole Julia Kaiser confirme également que les MAX 8 de la compagnie n’ont pas la même configuration que l’avion dont le hublot a explosé en vol.
Elle ajoute que WestJet est en communication constante avec Boeing afin de s’assurer qu’il n’y aura pas de conséquence pour sa flotte de MAX 8. En mars 2019, le ministère fédéral des Transports avait ordonné la fermeture immédiate de l’espace aérien canadien au Boeing 737 MAX 8 à la suite de deux catastrophes aériennes ayant entraîné la mort de 346 personnes en Indonésie et en Éthiopie. L’avis d’interdiction a été levé en janvier 2021.
C’était vraiment brutal Selon le site spécialisé FlightAware, le Boeing 737 MAX 9 a décollé précisément à 17 h 07, se dirigeant vers Ontario, en Californie, avant de revenir à l’aéroport une vingtaine de minutes plus tard. Des images diffusées sur les réseaux sociaux ont montré le hublot soufflé avec des masques à oxygène pendant du plafond de l’appareil. Un passager du vol, Kyle Rinker, a expliqué à la télévision américaine CNN que le hublot a sauté juste après le décollage.
C’était vraiment brutal. À peine en altitude, la façade du hublot s’est tout simplement détachée et je ne m’en suis aperçu que lorsque les masques à oxygène sont descendus , a-t-il raconté. Une autre passagère, Vi Nguyen, a dit au quotidien américain The New York Times qu’elle a été réveillée par un bruit fort durant le vol. J’ai ouvert les yeux et la première chose que j’ai vue, c’était le masque à oxygène juste devant moi. J’ai regardé sur la gauche et le panneau latéral était parti.
Vi Nguyen dit avoir cru qu’elle allait mourir. Après avoir fait demi-tour, l’avion est revenu se poser à son aéroport d’origine, l’incident n’occasionnant que quelques blessés légers. L’appareil avait pourtant été certifié en novembre, selon le registre de l’Agence fédérale américaine de l’aviation, disponible en ligne. Le constructeur de l’appareil, l’avionneur américain Boeing, a écrit sur le réseau X (ex-Twitter) qu’il rassemblait davantage d’informations et qu’une équipe technique se tenait à la disposition des enquêteurs.
Le Bureau national de la sécurité des transports, la FAA et Alaska Airlines ont chacun assuré qu’ils enquêtaient sur l’incident. Nous sommes en accord avec la FAA et soutenons sa décision de réclamer une inspection immédiate des appareils de type 737-9 de même configuration que l’appareil incriminé , a réagi Boeing dans une déclaration transmise à l’ AFP.
Des précédents Ce n’est pas la première fois que le 737 MAX de Boeing est impliqué dans des accidents qui mettent en question sa sécurité. Alors qu’il est entré en service en 2017, deux de ces avions se sont écrasés en 2018 et en 2019, tuant 346 personnes. Dans le monde entier, les avions 737 MAX ont alors été cloués au sol pendant près de deux ans, le temps que la compagnie apporte des modifications à un système de commande de vol automatisé qui poussait le nez de l’avion vers le bas sur la base de lectures de capteurs défectueux.
Ouvrir en mode plein écran Un enquêteur circule parmi les débris du vol ET302 d’Ethiopian Airlines, qui s’est écrasé le 10 mars 2019. Cet écrasement, le deuxième d’un Boeing 737 MAX en moins de cinq mois, a eu pour effet de clouer tous ces appareils au sol pendant deux ans.
Fin décembre, Boeing a demandé aux compagnies aériennes propriétaires de 737 MAX de faire des vérifications à cause d’un risque de boulon desserré sur le système de contrôle du gouvernail. Par ailleurs, La Presse canadienne rapporte aujourd’hui que Boeing a demandé aux autorités fédérales américaines d’exempter un nouveau modèle de 737 MAX d’une norme de sécurité conçue pour empêcher une partie du boîtier du moteur de surchauffer et de se briser pendant le vol, et ce, jusqu’en 2026.
Boeing s’efforce de remédier au danger, ont déclaré des responsables fédéraux américains tout en demandant aux pilotes de limiter l’utilisation d’un système d’antigivrage par temps sec afin d’éviter des dommages qui pourraient entraîner une perte de contrôle de l’avion.
Sinon, avertit la FAA , les entrées d’air autour des moteurs pourraient devenir trop chaudes et des parties du boîtier pourraient se détacher et heurter l’avion, brisant éventuellement les vitres et provoquant une décompression rapide. C’est ce qui s’est produit lorsqu’une pale de ventilateur de moteur s’est cassée sur un 737 plus ancien lors d’un vol de la Southwest Airlines en 2018.
Un morceau du boîtier du moteur desserré a heurté et brisé un hublot et une femme assise à côté du hublot a été tuée. Ouvrir en mode plein écran Les débris causés par l’explosion d’un des moteurs du côté gauche de cet appareil ont fracassé un hublot et endommagé le fuselage.
Le problème de surchauffe ne concerne que le modèle MAX, dont les entrées de moteur sont en matériaux composites de carbone plutôt qu’en métal. Boeing a besoin de cette exemption pour commencer à livrer le nouveau MAX 7, plus petit, aux compagnies aériennes. Cependant, certains observateurs ont tiré la sonnette d’alarme quant au fait que la sécurité repose sur les pilotes, qui doivent se rappeler quand limiter l’utilisation du système d’antigivrage.
Vous attirez notre attention lorsque vous dites que des gens pourraient être tués , a déclaré Dennis Tajer, porte-parole des pilotes d’American Airlines, au Seattle Times , qui a rapporté la demande d’exemption vendredi. Nous ne sommes pas intéressés par des exemptions et par des accommodements qui dépendent de la mémoire humaine […]. Il doit simplement y avoir une meilleure solution.
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