La condamnation de M. Rusesabagina, datant de septembre 2021, avait suscité des réprobations internationales et de défenseurs des droits.
« Paul Rusesabagina et (son coaccusé) Callixte Nsabimana ont eu leurs peines de prison commuées par ordre présidentiel, après examen de leurs requêtes de clémence », a déclaré à l’AFP la porte-parole du gouvernement rwandais Yolande Makolo.
Les condamnations de 18 autres personnes pour terrorisme ont aussi vu leurs peines commuées, a-t-elle ajouté. Selon une source gouvernementale qui a requis l’anonymat, M. Rusesabagina et les autres détenus devraient être remis en liberté ce samedi.
Mme Makolo a précisé que le Rwanda « note le rôle constructif du gouvernement américain dans la mise en place de conditions pour le dialogue sur cette question, de même que la facilitation apportée par le Qatar ».
Mais elle a ajouté que « personne ne devrait se faire d’illusion sur ce que cela signifie, car il y a un consensus sur le fait que des crimes graves ont été commis, pour lesquels ils ont été condamnés ».
« Désir partagé »
Cette affaire a longtemps été source de contentieux entre Kigali et Washington. En mai 2022, Washington avait estimé qu’il était « injustement détenu » par la justice rwandaise et M. Kagame avait rétorqué que les Etats-Unis ne pouvaient pas l’« intimider » pour le forcer à le libérer.
Cette décision « est le résultat d’un désir partagé de réinitialiser les relations Etats-Unis/Rwanda », a déclaré sur Twitter l’attachée de presse du président, Stéphanie Nyombayire.
Selon un haut responsable américain sous le couvert de l’anonymat, la visite du secrétaire d’Etat Antony Blinken à Kigali en août « a joué un rôle clé dans la perspective d’une éventuelle libération de Paul ».
Stéphanie Nyombayire a de son côté souligné que « les relations étroites entre le Rwanda et le Qatar ont été la clé ».
Les pourparlers sur une éventuelle libération de l’opposant avaient débuté fin 2022 et une avancée s’est produite la semaine dernière lors de discussions entre le président Kagame et l’émir du Qatar, a indiqué une source proche du dossier.
Le gouvernement qatari a lui indiqué que l’opposant pourra aller au Qatar une fois qu’il aura été libéré. « Il ira ensuite aux Etats-Unis », a-t-il ajouté.
L’annonce de Kigali intervient près de deux semaines après que le président Kagame avait indiqué, lors d’une visite au Qatar, que des « discussions » étaient en cours concernant l’emprisonnement de M. Rusesabagina.
M. Rusesabagina a été détenu pendant 939 jours, selon le site Free Rusesabagina (Libérez Rusesabagina).
« Normes internationales »
Opposant depuis plus de 20 ans à Paul Kagame, qu’il a accusé d’autoritarisme et d’alimenter un sentiment anti-Hutu, Rusesabagina a utilisé sa renommée hollywoodienne pour donner un écho mondial à ses positions.
Ses tirades contre M. Kagame lui ont valu d’être traité comme un ennemi de l’Etat.
Les défenseurs des droits humains accusent le Rwanda – dirigé d’une main de fer par M. Kagame depuis la fin du génocide de 1994 au cours duquel 800.000 personnes ont été tuées – de réprimer la liberté d’expression et l’opposition.
M. Rusesabagina vivait depuis 1996 en exil aux Etats-Unis et en Belgique, avant d’être arrêté à Kigali en 2020 dans des circonstances troubles, à la descente d’un avion qu’il pensait à destination du Burundi.
« Sa remise en liberté conclurait une affaire qui a souligné le mépris flagrant du Rwanda pour les normes internationales », a dit à l’AFP Lewis Mudge, directeur Afrique centrale pour Human Rights Watch.
L’opposant a été jugé de février à juillet 2021 pour neuf chefs d’accusation, dont celui de « terrorisme« , pour des attaques menées par le FLN, organisation classée terroriste par Kigali, qui ont fait neuf morts en 2018 et 2019.
Paul Rusesabagina a admis avoir participé à la fondation en 2017 du Mouvement rwandais pour le changement démocratique (MRCD), dont le FLN est considéré comme le bras armé, mais il a toujours nié toute implication dans les attaques
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