Ici, en République démocratique du Congo, siège d’une Église catholique d’au moins 50 millions d’âmes, en pleine crise sécuritaire dans l’est du pays, au début d’une année électorale qui s’annonce très compliquée, dans un contexte de corruption généralisée, ce voyage papal prend encore une autre dimension pour l’avenir des principales institutions du pays.
Pour Félix Tshisekedi, aussi peu catholique soit-il, c’est le moment de tenter de se draper dans l’habit d’un vrai chef d’État. Pour un président mal élu, mal entouré, avec un bilan politique, institutionnel et social nul, cette visite papale est du pain bénit afin de tenter de crédibiliser son pouvoir et tracer la route qui doit le mener vers un second mandat lors de l’hypothétique élection présidentielle du 20 décembre prochain. C’est aussi le moment d’essayer de faire monter encore un peu plus la pression sur le voisin rwandais, seul coupable, selon sa vision étriquée et volontairement simpliste, de tous les maux à l’est du pays.
Pour l’Église catholique, ce voyage est essentiel sur ce continent africain devenu son premier vivier, dans un pays ultrareligieux, où ses évêques ont été de tous les combats aux côtés du peuple. Du maréchal Mobutu à Joseph Kabila, les catholiques ont osé défier les excès du pouvoir, parfois, comme en 2017 encore, au prix de nombreuses vies. Pour ces combats récents, pour les enjeux à venir à très court terme, le Pape doit trouver les mots justes pour remobiliser un peuple fatigué de prendre des coups et de ne jamais recevoir le prix de son engagement. Le Pape doit d’autant plus trouver ces mots qu’il fait face à une Église catholique ethniquement divisée et à l’explosion des temples du réveil, institutions au service du plus offrant qui érigent des prédicateurs gouailleurs au rang de nouveaux prophètes. Le Congo est devenu un État sans État, sans état d’âme. Lui donner un cap au profit de cent millions d’âmes torturées sera un enjeu majeur.
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