Le gouvernement du plus petit Etat d’Afrique continentale a dit dans un communiqué que quatre soldats avaient été arrêtés et assuré que la situation était « totalement sous contrôle ».
Aucune confirmation n’a été obtenue d’autre source que le communiqué gouvernemental, et la capitale Banjul présentait mercredi un visage habituel, ont rapporté des correspondants de l’AFP.
De rares témoignages ont fait état de mouvements de soldats autour du siège de la présidence dans le centre de Banjul mardi soir, et les rumeurs ont circulé durant la nuit sur une tentative de coup de force dans ce pays ayant accédé en 2017 à un fragile régime démocratique, après 22 années de dictature sous Yahya Jammeh.
Sulayman Njie, un entrepreneur de 25 ans, a participé jusqu’à 4H00 du matin à une conférence sur les jeunes. « Nous n’avons rien vu d’inhabituel », a-t-il déclaré à l’AFP.
Le parlementaire Momodou Lamin Bah, de retour de la conférence mercredi midi, dressait le même constat: « On ne voit pas de présence sécuritaire renforcée, tout est normal ».
Ce serait la dernière tentative de coup de force en date en Afrique de l’Ouest depuis 2020, après deux putschs réussis au Mali et au Burkina Faso et un autre en Guinée, et une tentative de fait accompli en Guinée-Bissau.
Cette série inquiète vivement les dirigeants ouest-africains, confrontés à une multitude de défis – de la pauvreté à la propagation du jihadisme – aggravés par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine.
« Le gouvernement de la Gambie annonce que, sur la base de renseignements indiquant que certains soldats de l’armée gambienne complotaient pour renverser le gouvernement démocratiquement élu du président Adama Barrow, le haut commandement (des forces armées gambiennes) a rapidement monté une opération militaire hier et a arrêté quatre soldats », a écrit dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux Ebrima G. Sankareh, porte-parole du gouvernement et conseiller présidentiel.
Les quatre soldats sont interrogés par la police militaire et trois complices sont recherchés, a-t-il dit.
« Le gouvernement invite instamment les citoyens, les résidents et les membres des corps diplomatique et consulaire à vaquer normalement à leurs occupations; la situation est totalement sous contrôle et il n’y a pas lieu de paniquer », a-t-il dit.
Dans la soirée, la police gambienne a affirmé dans un autre communiqué avoir interrogé Momodou Sabally, ancien ministre des Affaires présidentielles sous le régime Jammeh, après la diffusion d’une vidéo qui suggère que le président sera renversé avant les prochaines élections locales.
– Jammeh toujours là –
L’accession surprise d’Adama Barrow à la présidence en janvier 2017 avait mis fin à deux décennies de gouvernement autocratique dans ce petit pays pauvre de deux millions d’habitants. M. Barrow a largement remporté un deuxième mandat en décembre 2021, lors d’une présidentielle constituant la première transition ouverte à la tête de cette ancienne colonie britannique depuis la dictature.
Les partenaires internationaux de la Gambie poussent cependant le gouvernement à d’importantes réformes pour consolider la démocratie, dont celle des services de sécurité.
Yahya Jammeh, en exil en Guinée équatoriale, continue d’exercer une forte influence. S’exprimant par téléphone aux participants à une réunion publique samedi en Gambie, il a assuré qu’il rentrerait bientôt et dirigerait à nouveau le pays.
Mercredi, la commission de la Cédéao (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) a dit avoir appris la tentative de putsch avec « choc et consternation », et l’a fermement condamnée dans un communiqué.
Réunis en sommet début décembre à Abuja, au Nigeria, les dirigeants des Etats membres de l’organisation régionale, dont fait partie la Gambie, ont décidé la création d’une force régionale vouée à intervenir en cas de putsch, s’inquiétant d’un effet de contagion des coups d’Etat.
Les chefs d’état-major des pays membres se sont réunis sur le sujet le 19 décembre en Guinée-Bissau. Leur rapport final les montre très réservés. Ils font valoir qu’il existe déjà en principe une « force en attente de la Cédéao » susceptible de « toutes les formes d’intervention ». Encore faudrait-il lui donner le mandat et les capacités nécessaires pour intervenir en cas de coup d’Etat, disent-ils.
Par ailleurs, une telle intervention « pourrait s’avérer difficile, notamment lorsque la population et/ou une grande partie des forces armées adhèrent au changement anticonstitutionnel dans le pays concerné », disent-ils.
Une mission de la Cédéao forte de plusieurs centaines d’hommes est présente en Gambie depuis janvier 2017: l’Ecomig assure une protection rapprochée et déploie des patrouilles pour le président et les membres du gouvernement. La Cédéao vient de renouveler son mandat pour un an à compter du 1er janvier 2023. Mais elle a préconisé une réduction de la force au cours de cette période.
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