Burundi : Le président Ndayishimiye perd son bras de fer pétrolier

Burundi : Le président Ndayishimiye perd son bras de fer pétrolier

Les automobilistes burundais poussent un énorme ouf de soulagement, la pénurie de carburant, qui sévit depuis le mois de novembre dernier, touche à sa fin.

Tout va rentrer dans l’ordre grâce à l’initiative du président de la République… et à Interpetrol”. Tel est en substance le message diffusé dans un long clip promotionnel par Freddy Ipoma, le directeur général adjoint de la principale société pétrolière burundaise.

Dans les faits, le pouvoir burundais du président-général Évariste Ndayishimiye, alias Neva, a dû revoir complètement ses plans. “Le président a capitulé, il n’a pas eu le choix”, constate un observateur attentif de la situation socio-politique burundaise. “Son plan, soufflé par certains de ses amis, a été un terrible échec qui a conduit en quelques mois le pays au bord de la faillite”.

Proximité profitable à double sens

Le pouvoir des militaires burundais avide de gonfler ses rentrées financières a tenté de faire pression sur la société Interpetrol, dirigée par Taruk Bashir, un homme d’affaires de 71 ans d’origine indo-pakistanaise, né au Burundi, disposant de la double nationalité tanzanienne et burundaise, qui s’est lancé dans le business du pétrole au début des années 90.

Burundi : La pénurie de carburant fait monter la colère et menace le pouvoir

M. Bashir était dans les petits papiers de l’ancien président burundais Pierre Nkurunziza. Il en a profité pour se développer (sans oublier son ami) au point de disposer d’un quasi-monopole dans la distribution du pétrole au Burundi. Avec des centaines de camions (dont 450 camions-citernes), des centres de stockage, un réseau de stations et des accords avec de nombreux autres points de vente, Interpetrol est devenu un acteur économique incontournable. Pierre Nkurunziza disparu, son successeur “Neva” s’est fait plus gourmand. “Surtout certains de ses conseillers”, explique une source de Bujumbura. Le bras de fer pouvait commencer. “Taruk Bashir a refusé de céder aux pressions du pouvoir”, expliquait un homme proche du dossier.

Mais au Burundi, pour disposer de devises, il faut passer par la Banque centrale. Celle-ci a largement restreint ses échanges avec Interpetrol et a approvisionné un cartel proche de la présidence chargé de “casser” le quasi-monpole de M. Bashir. Souci, ces proches ne disposaient ni de la flotte, ni des capacités de stockage, ni du réseau de vente, ni du réseau d’achat qu’Interpetrol avait développé au fil des ans, notamment avec la société pétrolière tanzanienne – en lien avec Oman – qui appartient à l’ancien président tanzanien Kikwete. Du coup, même avec les millions de dollars de Banque nationale, le nouveau circuit rêvé par le pouvoir burundais n’a jamais pu alimenter les pompes du pays.

Une situation qui a engendré la colère de tous les usagers et pousser l’inflation vers de nouveaux sommets (20 %, selon les chiffres de la Banque mondiale). En effet, le carburant se faisant rare, le marché parallèle s’est développé et le litre qui se vendait à 3 .350 francs burundais (FB) est monté entre 6 .000 et 12. 000 (FB). Conséquence immédiate, les transporteurs ont répercuté cette augmentation sur les biens transportés mettant l’économie du pays à genoux en quelques mois.

Incapables de s’improviser grand trader en pétrole, “Neva” et sa clique ont été contraints de remettre en selle Interpetrol pour éviter que la grogne sociale ne monte encore. Taruk Bashir a remporté son bras de fer mais, en bon commerçant, n’oublie pas de présenter le président de la République – à l’origine de la crise – comme l’élément clé de la solution. Dans ce scénario, la modestie est mère de toutes les vertus.

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