Cette décision, annoncée par un communiqué du ministère des Affaires étrangères, s’applique jusqu’à « l’organisation d’une réunion » par la partie malienne avec la Minusma, dont la date n’a pas été communiquée, pour « faciliter la coordination et la réglementation » de la rotation de ces contingents.
La réunion visera, selon Bamako, à « dégager un plan optimal » pour l’organisation de ces rotations à l’avenir.
Les autorités maliennes justifient leur décision, qui concerne les 12.261 soldats et 1.718 policiers déployés au Mali par une cinquantaine de pays contributeurs, en invoquant le « contexte de sécurité nationale ».
Cette mesure intervient cinq jours après l’interpellation de 49 militaires ivoiriens, des « mercenaires » selon Bamako, qui les accusent d’avoir eu comme « dessein funeste » de « briser la dynamique de refondation » de l’Etat malien.
Selon Abidjan, ils étaient déployés au Mali en tant qu’Elements nationaux de soutien (ENS), une procédure de l’ONU permettant aux contingents des missions de maintien de la paix de faire appel à des prestataires extérieurs pour des appuis logistiques.
Les autorités maliennes assurent la Minusma de travailler de « manière diligente en vue de réunir les conditions propices à la levée de cette mesure suspensive », déclare le communiqué.
C’est un nouvel accroc diplomatique dans les relations entre le Mali et la Minusma, présente au Mali depuis 2013, qui vient d’avoir son mandat renouvelé pour un an le 29 juin.
Ce renouvellement s’est accompagné d’une « opposition ferme » du Mali à la liberté de mouvement des Casques bleus pour des investigations liées aux droits de l’homme.
Son ambassadeur à l’ONU Issa Konfourou avait notamment déclaré que Bamako « n’entend pas exécuter » les dispositions du mandat liées à la libre-circulation des Casques bleus pour des investigations sans feu vert préalable.
« Les mouvements de la Minusma ne (pourront) se faire qu’avec l’accord des autorités » maliennes, avait-il dit.
Cette entrave dans la liberté de mouvement officialisée fin juin remonte dans les faits à janvier, d’après des diplomates, période qui a coïncidé avec le déploiement au Mali de paramilitaires de la société privée russe Wagner.
Le 7 juillet, le chef de la Minusma El-Ghassim Wane avait affirmé en conférence de presse que la mission avait besoin du « soutien et (de) la coopération des autorités maliennes » appelant à un « dialogue constant » pour surmonter des « incompréhensions ».
– Bras de fer diplomatique –
Cette suspension intervient dans un contexte de bras de fer diplomatique qui dure depuis plusieurs mois entre Bamako et ses partenaires: la France, d’abord, que le Mali a poussée vers la sortie début 2022 après neuf ans de présence militaire dans le pays, via l’opération Serval puis Barkhane.
Les derniers soldats français doivent quitter le Mali d’ici quelques semaines.
Puis avec la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (Cédéao), qui a durant six mois durement sanctionné le Mali en raison du non-respect de ses engagements, notamment sur la question sensible du retour des civils au pouvoir.
Les sanctions économiques et financières ont finalement été levées début juillet après la présentation d’un chronogramme électoral fixant le prochain scrutin présidentiel à février 2024.
Bras de fer avec la Côte d’Ivoire, enfin, depuis dimanche après l’interpellation de 49 soldats à l’aéroport de Bamako.
Mi-janvier, le Mali avait suspendu pour quelques jours les opérations aériennes de la Minusma à la suite, selon elle, d’une réorganisation par les autorités maliennes du processus d’approbation des vols au-dessus du territoire en conflit. Des « discussions fructueuses » avaient permis la levée de cette suspension.
Outre ses opérations dans le ciel malien, la Minusma effectue constamment des vols entre la sous-région et le Mali, notamment pour approvisionner ses Casques bleus, évacuer ses blessés, et dans le cadre de rotations de contingents.
Le Mali a été le théâtre de deux coups d’Etat militaires en août 2020 et en mai 2021. La crise politique va de pair avec un conflit qui ne cesse de s’aggraver depuis ses débuts en 2012.
A l’époque, des groupes armés indépendantistes puis jihadistes combattaient l’Etat dans le nord du pays. Un accord de paix a été signé avec les premiers en 2015.
Les violences jihadistes se sont elles étendues vers le centre puis le sud du Mali, et aux Niger et Burkina Faso voisins.
Les groupes jihadistes, affiliés pour certains à la nébuleuse mondiale Al-Qaïda et pour un autre à l’organisation Etat islamique (EI), sont présents sur d’immenses pans de territoires de ces trois Etats sahéliens.
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